L’essence de Massy : Mike TADJER et son héritage rugbystique
01/03/2024Né à Massy, tu es un pur produit de cette ville et de son école de rugby. Peux-tu nous raconter ton enfance et ton parcours rugbystique, comment es-tu devenu joueur de rugby professionnel ? Sans oublier ton titre de Champion de France Teulière en 2005 !
J’ai commencé le rugby à Massy grâce à Alain Gazon qui faisait le tour des écoles primaires de la ville pour promouvoir le rugby. Il est venu faire une séance dans mon école et moi, étant un peu plus costaud et plus rond que les autres à mon âge, ça m’a plu de rentrer dans les mecs, cette notion de se défouler, de pouvoir un peu se donner des coups toujours dans la légalité, c’était cool !
J’ai continué dans cette voie-là, j’ai eu la chance de m’entraîner avec beaucoup de copains parce qu’évidemment tu te fais beaucoup de copains dans un club car le rugby est une grande famille. On a eu des beaux moments de vie ensemble entre les stages pendant les vacances, et cette année de Champion de France Teulière sur un match nul contre Gaillac. Après, chacun a pris des voies différentes, que ce soit professionnel dans le rugby ou dans un autre secteur, mais on est tous encore en contact aujourd’hui.
Après avoir évolué et gagné de l’expérience dans différents clubs, tu décides fin janvier de mettre un terme à ta carrière de rugby au sein de ton club formateur. Tu as toujours eu cette idée en tête ?
De base, je n’étais pas prédisposé à devenir joueur de rugby professionnel, c’est quelque chose qui m’est venu un peu tard. Une fois que j’ai été professionnel, c’est vrai que plus je me rapprochais de la fin de ma carrière, plus je me disais que j’aimerais vraiment beaucoup finir à Massy. Après la Coupe du Monde, j’avais décidé d’arrêter complètement, mais Benoît Denoyelle co-entraîneur de Massy m’a contacté parce qu’ils étaient un peu en galère, ayant perdu beaucoup de monde depuis sa descente de Pro D2.
Pour moi, cela a été un choix facile mais que j’ai dû partager avec ma famille car nous sommes installés dans le sud de la France. Ma femme a fait beaucoup de sacrifices et d’efforts pour ma carrière sur les 15 dernières années, et c’était important que les enfants comprennent que leur papa ne serait pas là tous les jours, que je reviendrais occasionnellement, une fois par semaine. Au bout de quatre mois, cela devenait trop dur et j’ai donc décidé de mettre un terme à ma carrière plus tôt que prévu. Mais j’ai été très heureux de finir là où tout a commencé, et j’espère que d’autres joueurs qui sont passés par Massy feront la même chose que moi, car cela véhicule de belles choses pour la suite.
Quels ont été les enseignements majeurs que tu as tirés de tes années au RC Massy Essonne ?
Cela a été, tout simplement, des valeurs de solidarité ! Dès tout jeune, tu apprends qu’au rugby tu ne peux rien faire tout seul. Cela a été des choses assez simples que ce soit par des goûters, ou de venir à l’entraînement même quand il pleut parce que les copains font l’effort de venir. Tu n’y penses pas sur le moment, mais avec le recul et la maturité maintenant, tu prends conscience des valeurs inculquées et des liens créés avec les copains.
Cette grosse notion de solidarité, de famille, c’est quelque chose qui a été très utile et qui est beaucoup mis en avant par ce club. Il n’y a que par la formation et par toutes ces valeurs-là que le club grandira et arrivera à perdurer dans le temps, parce que c’est dur d’exister avec le Stade Français et le Racing 92 à côté. C’est un club qui reste très familial, et avec de très belles valeurs, il m’a fait grandir, donc je suis très heureux !
Dans 15 jours, le public francilien s’apprête à retrouver les Portugais qui participeront aux finales du Rugby Europe Championship au Stade Jean Bouin, quel regard portes-tu sur l’évolution du rugby portugais ?
J’ai fait 13 ans avec Os Lobos et c’est vrai que j’ai vu l’équipe évoluer en bien. Quand j’ai intégré la sélection, j’étais semi-pro à Massy mais on y était déjà mieux structurés qu’avec l’équipe nationale. Petit à petit, on a essayé de tendre vers quelque chose de bien. L’un des gros électro-chocs s’est effectué avec la nomination de Patrick Lagisquet sur ces quatre dernières années. Quand il est arrivé, avec la grande carrière d’entraîneur qu’il a eue, il a dit qu’il ne venait pas pour l’argent, mais pour un projet qui avait pour but de se faire plaisir. Et c’est ce qui s’est passé, il a connecté tous les fusibles pour le faire. Cela commençait par s’entraîner ensemble le matin et l’après-midi, en jeu collectif. Il y avait des mecs qui bossaient en télétravail depuis le stade : dès qu’ils finissaient les journées, ils pouvaient venir s’entraîner ! En termes de vidéo, d’entraînements, de contenu, d’intensité, tout a changé le jour où Patrick est arrivé, il a été un des grands hommes forts de l’évolution du rugby au Portugal.
Comment perçois-tu le niveau de compétitivité des équipes engagées dans le REC ? Vois-tu les Portugais succéder aux Georgiens, les champions en titre ?
Le niveau est très homogène, il y a des équipes qui sont en troisième tiers telles que la Pologne, les Pays-Bas, la Belgique, ce sont des nations qui se veulent émergentes sur les prochaines années, comme le Portugal l’a été cinq ans auparavant. Je ne pense pas que nous succèderons aux Géorgiens et je ne pense pas que quelqu’un d’autre succèdera aux Géorgiens, si ce n’est les Géorgiens.
Pour le Portugal, c’est compliqué puisque avec le départ de Patrick il y a un nouveau projet, on essaye de se structurer pour l’avenir. C’est un renouveau, d’autant plus que beaucoup de joueurs importants ont arrêté leur carrière. Je pense à Samuel Marques, Thibaut de Freitas, moi-même. Maintenant, il faut retrouver des leaders, et bien structurer avec un bon staff. Parce qu’il y a de la qualité, on peut le voir avec Raffaele Storti en Pro D2, Rodrigo Marta, Vincent Pinto, Diogo Ferreira qui est pilier droit à Dax. Il faut que ça prenne pour qu’on reparte sur un nouveau cycle et faire de belles prestations, c’est tout ce que je leur souhaite !
En dehors du rugby, quelles sont tes passions et les projets personnels qui vont occuper ton temps ? Va-t-on continuer à te voir sur les terrains ?
Pour mon après carrière, j’ai investi dans un club de plage, ouvert de mai à septembre à Saint-Cyprien. Tu as des transats, tu peux y manger le midi et le soir. Cette ouverture représente un gros boulot pendant cinq mois, à bosser 7 sur 7 !
Sur les terrains, à Massy, je me suis un peu surpris à aimer transmettre à certains jeunes qui étaient demandeurs ! Je me suis donc mis à entraîner les M8 de l’USAP avec mon fils qui joue là-bas. Je ne serais pas contre de faire des interventions mêlées pour les jeunes ou pour l’équipe première du club ou ailleurs même, mais pour l’instant, après avoir fait beaucoup bouger ma famille pendant ma carrière, l’idée est de rester ici, autour des terrains avec les petits M8.